vendredi 5 novembre 2010

Jean-Loup

Pour Jean-Loup, c’est enfin les grandes vacances. Mais une mauvaise surprise l’attend. Ses parents lui annoncent qu’il passera son été en Normandie chez Papi et Mamie Toussaint, ces grands parents qu’il ne connaît même pas. Pour lui c’est la catastrophe : « Mais c’est horrible la Normandie, il y pleut tout le temps ! L’été ça existe pas là-bas ! ». A son arrivée, il découvre que la maison où il va habiter est une baraque toute sombre en lisière de forêt. Papi et Mami ont l’air d’être de sacrés illuminés mais petit à petit, Jean-Loup va apprendre à les apprécier. Il va aussi rencontrer la petite Rosanne et le séjour va se révéler au final plutôt agréable pour un gamin qui pensait au départ passer les pires vacances de sa vie.

Voila un album inclassable. Déjà, il conviendra aussi bien aux enfants (à partir de 9 ans) qu’aux adultes. Chacun pourra y trouver son compte. Ensuite, c’est à la fois poétique, onirique et fantastique. Si je rajoute que les couleurs sont franchement psychédéliques, ça commence à faire beaucoup de « iques ! ». Allez, un petit dernier pour la route : disons que Jean-Loup est quelque sorte un récit initiatique. C’est le passage de l’enfance à l’adolescence, la découverte des premiers émois amoureux et la révélation d’un secret de famille qui va bouleverser la vie d’un jeune garçon. Au niveau graphique (encore un « ique »), on sent l’influence de Joann Sfar. Les membres très étirés des différents personnages m’ont aussi fait penser au travail de Cyril Pedrosa sur son chef d’œuvre Trois ombres. Certaines pages tiennent presque plus du story board que du dessin vraiment léché mais ça passe sans problème car on reste dans l’ambiance vaporeuse du récit.

Un album plein de charme qui plaira à ceux qui aimaient entendre leur maman leur raconter une histoire le soir avant de s’endormir. A lire avant de plonger dans les bras de Morphée.

Jean-Loup, de Benoît Frébourg, éditions Delcourt, 2010. 58 pages. 13,95 euros. A partir de 9 ans.

L’info en plus : Jean-Loup est inspiré du recueil de poésie de Tim Burton La Triste Fin du petit enfant huître et autres histoires dans lequel le réalisateur raconte des histoires courtes sur des enfants-monstres. Le poème de Benoît Frébourg que l’on peut lire à la dernière page de l’album est le véritable point de départ du projet de création de Jean-Loup.



Lu dans le cadre du challenge Pal sèche de Mo'

mercredi 3 novembre 2010

Milady de Winter T1

Épouse du mousquetaire Athos, la future Milady de Winter est pendue à un arbre par son mari le jour où il découvre une fleur de lys sur son épaule, une marque symbole d’infamie que les bourreaux infligeaient aux voleurs et aux prostitués. Ayant survécu miraculeusement à cette tentative d’assassinat, elle se réfugie en Angleterre où elle rencontre Lord de Winter, dont elle tombe amoureux. Ce second époux périt suite à un terrible concours de circonstances. Violée par le Duc de Buckingham le jour de l’enterrement, Milady de Winter ne va cesser de nourrir sa rancœur vis-à-vis de la gente masculine. Engagée comme espionne par le cardinal de Richelieu, elle va notamment être impliquée dans la fameuse affaire des férets de la Reine Anne d’Autriche. Doublée par les mousquetaires au dernier moment, elle restera néanmoins dans les bonnes grâces du Cardinal et deviendra une intrigante manipulatrice, sans aucun état d’âme.

Agnès Maupré à choisi de prendre à contre-pied la classique histoire des mousquetaires en focalisant son attention sur un personnage secondaire. Une femme ambitieuse, libre, qui n’hésite pas à user de ses charmes pour obtenir ce qu’elle veut. Mais Milady est aussi une femme seule qui doute et qui souffre, se révélant au final à la fois fragile et vulnérable.

Le trait m’a rappelé celui du duo Kerascoët sur la série Miss pas touche. Le choix du lavis (technique picturale consistant à n'utiliser qu'une seule couleur diluée pour obtenir différentes intensités) permet une grande variation des niveaux de gris et donne aux aventures de Milady un coté clair/obscure très parlant. Avec ce portrait de femme en BD, comment ne pas penser à la magnifique biographie de Calamity Jane (Martha Jane Canary) mise en images par Matthieu Blanchin et Christian Perissin. Petit bémol toutefois au niveau du dessin, les décors urbains et les intérieurs manquent parfois de détails et de réalisme. Autre très gros soucis, les différentes représentations des chevaux sont tout simplement affreuses.

Mais ce ne sont là que quelques détails sans importance. La vie de l’espionne de Richelieu telle que l’a imaginée Agnès Maupré vaut vraiment le coup d’œil. Les femmes fatales qui ne se cantonnent pas au rôle de potiche ne sont pas légion en bande dessinée. Une chose est sûre, cette Milady de Winter tient plus de la Nana de Zola que de Bécassine. Le second et dernier tome est prévu l'année prochaine.

Milady de winter T1, d’Agnès Maupré, éditions Ankama, 2010. 134 pages. 14,90 euros.



L’info en plus : Agnès Maupré a réalisé l’adaptation en BD de quatre Contes du Chat Perché d’après Marcel Aymé. Deux volumes sont parus en 2008 aux éditions Gallimard dans la collection Fétiche.




Challenge Pal sèche

La BD du mercredi chez Mango


lundi 1 novembre 2010

Où j'ai laissé mon âme - Jérôme Ferrari

Alger, mars 1957. Le capitaine André Degorce et son équipe ont pour charge de faire parler les prisonniers qui passent entre leurs mains. Tous les procédés sont bons pour obtenir une information. Lorsque les « terroristes » ont vidé leur sac, ils sont transférés chez le lieutenant Horace Andréani qui, le plus souvent, les fait disparaître définitivement. Degorce et Andréani ont un passé commun. Ils ont combattu ensemble en Indochine. Les deux hommes ont vécu l’horreur de la détention et l’humiliation de la défaite. Degorce a de plus été interné plusieurs mois à Buchenwald pendant la seconde guerre mondiale. De victime, il est devenu bourreau. Il s’applique à remplir les missions qui lui sont confiées mais il s’interroge sur le sens de ses actions. Un questionnement métaphysique qui le pousse à affronter l’évidence : il a laissé son âme quelque part derrière lui, sans se rappeler ni où ni quand.

Trois jours. Du 27 au 29 mars 1957. Les événements s’enchaînent avec l’arrestation de Tahar, le commandant de l’ALN. Le réseau est enfin décapité mais le capitaine Degorce n’en tire aucune satisfaction. Il repense au cheminement qui, depuis son engagement dans la résistance en 1944 alors qu’il n’avait que 19 ans, l’a poussé à se retrouver en ce printemps 1957 à torturer des pauvres bougres dans des caves algéroises. Une plongée au plus profond des tourments de l’âme humaine.

N’ayons pas peur des mots : l’écriture de Jérôme Ferrari est ici éblouissante. Le ton n’est ni trop sec, ni trop lyrique. Il n’y a pas un mot de trop. La construction est limpide et tous les éléments s’imbriquent pour que le lecteur comprenne les errements du capitaine Degorce et le courroux affiché par le lieutenant Andréani. Les descriptions des scènes de tortures ne sont pas du tout racoleuses. Froides, inhumaines, elles frappent aux tripes et donnent la nausée. Comment pourrait-il en être autrement ?

Où j’ai laissé mon âme est un roman ambitieux. Il m’a tout simplement bouleversé. Il y a bien longtemps que je n’avais pas lu un texte aussi fort. Clairement un des chocs de la rentrée littéraire.

Où j’ai laissé mon âme, de Jérôme Ferrari, Actes Sud, 2010. 154 pages. 17 euros.

L’info en plus : Où j’ai laissé mon âme fait partie de la sélection du prix des libraires qui sera remis le 18 mars prochain. Je ne suis pas libraire mais franchement, si je faisais partie du jury, il y a fort à parier que le roman de Jérôme Ferrari serait mon petit chouchou, loin devant les 17 autres candidats !

vendredi 29 octobre 2010

Manabé Shima

Été 2009. Florent Chavouet décide de passer deux mois sur Manabé Shima, une petite île de la mer intérieure du Japon. Logé dans une auberge de jeunesse, il part à la découverte d’une île où les quelques 300 habitants, essentiellement pêcheurs, ont gardé un mode de vie simple et proche de la nature, à des années lumières de la folie technologique des grandes villes. Armé de ses crayons et de son carnet, il dessine les petits événements qui vont rythmer son séjour.

Ce carnet de voyage propose une alternance entre des scènes de la vie quotidienne, des planches quasi naturalistes (les légumes, les poissons, les crustacés...), des visites des différents sites importants de l’île ou encore des descriptions ultra fidèles de l’intérieur des maisons dans lesquelles le dessinateur a été invité. Florent Chavouet est à la fois exhaustif et extrêmement précis. Mais son ouvrage n’est pas qu’une compilation froide d’impressions. L’auteur exprime une vraie empathie pour Manabé Shima et ses habitants. Jamais son plaisir n’est feint, ça crève les yeux. Il n’hésite pas non plus à saupoudrer ses textes de quelques touches d’humour qui confèrent à l’ensemble beaucoup de légèreté.

Niveau dessin, le bougre sait y faire. Chaque page fourmille de détails. Son trait, tout en rondeur, respire la bonhommie et la joie de vivre. Il sait aussi croquer avec talent les attitudes et les mouvements (le combat de chats est à ce titre remarquable). Et que dire de ces intérieurs de logis que l’on visite en plongée : un régal ! Certes les perspectives ne sont pas toujours orthodoxes, mais le rendu final est superbe et très parlant.

Manabé Shima est donc un délicieux carnet de voyage où le lecteur partage le magnifique été passé par un jeune français amoureux du Japon. C’est aussi un bel hommage rendu aux milliers de petites îles de l’archipel nippon. Un beau cadeau à offrir ou à se faire offrir !

Manabé Shima, de Florent Chavouet, éditions Philippe Picquier, 2010. 142 pages. 23,00 euros.




L’info en plus : Florent Chavouet a publié un premier carnet de voyage sur le Japon l’année dernière. Tokyo Sanpo décrit l'âme de Tokyo et de ses habitants au fil d'une promenade dans la ville et de rencontres inattendues. L'étrangeté de la capitale japonaise est présentée à travers ses parcs et ses rues, les voitures, les vêtements ou les temples. Chaque chapitre s'organise autour d'un quartier. Prix Ptolémée de géographie 2009. http://www.florentchavouet.com/

mercredi 27 octobre 2010

Bambou T1

Le petit cerf Bambou vient de naître et tous les animaux de la forêt sont réunis pour l’accueillir. Son père Abrahaaam s’est fait la malle quand il a su qu’il allait être papa. Elevé par sa mère, Bambou intrigue ses congénères : son regard inquiétant fait froid dans le dos. La vraie nature du jeune faon est révélée le jour où lui pousse sa première dent. Attiré par la chair fraîche, Bambou devient un terrible carnivore ! Il commence par boulotter sa mère avant de s’attaquer à d’autres proies : quelques lapins, un écureuil, un oiseau… Lorsque Pafpaf, son seul ami, découvre la terrible vérité, il décide de convertir le petit cerf sanguinaire au végétarisme…

Franchement, il fallait oser : faire de l’icône Bambi un serial killer qui s’attaque aux animaux de la forêt ! Et Panpan qui devient Pafpaf, une sorte de lapin crétin affublé d’un toc ridicule. Sans oublier un bestiaire qui regorge d’animaux plus stupides et naïfs les uns que les autres. La parodie est ici sans équivoque. Elle s’adresse essentiellement aux adultes qui n’en peuvent plus de la mièvrerie « Dysnéenne ». Alors attention, ne laisser pas tomber ce brûlot dans les mains de votre jeune progéniture, elle en ressortirait fortement secouée.

Au niveau graphique, lorsque l’on ouvre la BD pour la première fois, on a l’impression d’être tombé sur le travail collectif de fin d’année d’une école primaire. Vous savez, quand les enfants ont mené un atelier d’écriture et de dessin et que l’enseignant a finalisé le projet en imprimant un exemplaire pour les parents. Des dessins au crayola, sans aucun encrage. Pas vraiment de cases, un lettrage que ne renierait pas ma fille de 8 ans… Bref, un vrai choc visuel quand on découvre cet album dans le rayonnage d’une librairie. Mais à y regarder de plus près, on constate que Gaëlle Alméras possède une réelle maîtrise de ses crayons de couleur. Les proportions sont bonnes, l’expressivité des visages et notamment des yeux est très travaillée et les décors, bien que simplissimes, fleurent bon la campagne.

Bambou est donc une œuvre underground assez typique de ce que peut proposer la BD indépendante. C’est le genre de titre qui n’aurait jamais pu voir le jour chez Dargaud, Delcourt ou Dupuis ! Quoi qu’il en soit, au-delà de l’originalité et de la parodie, je n’ai pas été spécialement embarqué. L’histoire, trop linéaire, n’est pas d’un grand intérêt. Mais le gros défaut, pour moi, est l’absence d’humour. Difficile de trouver des passages vraiment drôles. Peut-être que l’humour n’était pas le but premier, mais quitte à parodier, il aurait fallu pousser le bouchon encore plus loin et faire dans le trash gras et sans équivoque. Un second tome est prévu l’année prochaine. J’y jetterai un œil pour voir comment vont évoluer Bambou et Pafpaf, en espérant que la suite de leurs aventures gagnera en épaisseur et en rebondissements.

Bambou T1, de Gaëlle Alméras, éditions Diantre, 2010. 56 pages. 15 euros.



L’info en plus : Gaëlle Alméras est diplômée de l’école de l’image d’Epinal. Elle a publié un premier ouvrage, La Gouniche, aux éditions Diantre en janvier 2010.





La BD du mercedi, chez Mango

Challenge Pal sèche

lundi 25 octobre 2010

Rentrée littéraire 2010 (épisode 8) : Dernier train pour Buenos Aires

Quatre époques, quatre personnages, quatre points de vue pour une seule et même histoire. Dans ce bled paumé du fin fond de l’Argentine, un fait divers terrible s’est produit au cours de l’hiver 1959. Le premier à s’exprimer est le coiffeur Vicente Vardemann. Nous sommes en 1973. Vicente le taciturne décrit les non-événements qu’il observe derrière la vitre du salon de coiffure. Le second à prendre la parole se nomme Bicho Souza. Il sort du cinéma et s’installe à la terrasse d’un bistrot, en 1984. Viendront ensuite Miguelito Barrios (1966) et Folcada qui, lui, raconte cette fameuse journée de décembre 1959. Les quatre parties du roman semblent n’avoir aucun point commun. Pourtant, toutes ressassent à un moment donné les souvenirs d’hommes qui, de près ou de loin, ont vu leur vie bouleversée par le drame qui s’est noué autour d’une femme, la Negra Miranda et ses jambes sublimes. Ce n’est que dans les toutes dernières pages que l’on comprend le fin mot de l’histoire et le sens de ces témoignages.

Voila un très court roman dont la construction semble de prime abord très éclatée mais qui au final relève d’une implacable mécanique de précision. Totalement déstabilisé au départ par une narration hachée en très courts paragraphes sans ligne directrice claire, le lecteur doit dépasser cet apparent manque d’intérêt pour découvrir en filigrane les relations qui unissent les différents protagonistes. Pour ne pas perdre le fil et tirer la quintessence du récit, il me paraît essentiel de lire les 90 pages d’une traite.

Hernan Ronsino adapte le discours de chaque personnage en fonction de sa nature. Pour Vicente le taiseux, les phrases sont courtes et essentiellement descriptives. Bicho Souza est plus volubile, c’est un tchatcheur comme on en croise souvent dans les cafés. Et si le témoignage de Miguelitto Barrios est tout en pudeur et en retenu, celui de Folcada est empli de colère et de véhémence avec de nombreuses répétitions qui traduisent une colère à fleur de peau.

Au final, on ne peut que rester admiratif devant la finesse et l’originalité de la construction du roman. Mais il manque à mes yeux un petit supplément d’âme, ce soupçon d’épaisseur qui aurait permis de densifier le texte et de lui donner davantage de volume.

Dernier train pour Buenos Aires, d’Hernan Ronsino, éditions Liana Levi, 2010. 94 pages. 12 euros.

L’info en plus : Hernán Ronsino est né en 1975 à Chivilcoy, quelques mois avant le coup d'État. Sociologue, il enseigne aujourd'hui à l'Université de Buenos Aires. Il est l'auteur de nouvelles et d'un premier roman remarqué : La Descomposición (pas encore publié en France).

vendredi 22 octobre 2010

Mamé

Mme Cahen vit à la maison de retraite « Les beaux jours ». Elle passe ses journées dans son fauteuil roulant, voyant les visiteurs défiler, mais jamais pour elle. Ne supportant plus cette situation, elle s’échappe et file rejoindre son petit fils Loulou à l’école.
30 pages, 6 euros, 10 minutes de lecture. Voila pour les chiffres bruts. Pas emballant, à priori. Et pourtant ! Tour à tour histoire d’amour, de tendresse et de complicité, ce court récit met du baume au cœur. Il dénonce aussi : la façon dont nous traitons nos aînés, enfermés dans des mouroirs avec comme seule perspective quotidienne l’heure des repas. Que la maison de retraite de Mme Cahen s’appelle « Les beaux jours » n’est pas anodins. Belle ironie ! Finalement, Loulou et Mamé n’aspirent qu’à une chose : partager, ensemble, un dernier moment de liberté. Et le lecteur apprécie de passer ces quelques instants avec eux.
Deborah Pinto réalise ici son premier album. Son trait a quelques ressemblances avec celui d’Hisaichi Ishii (Mes voisins les Yamada). Le dessin manque parfois de fluidité et n’est pas encore tout à fait maîtrisé, mais il colle bien à la simplicité de l’histoire. Loïc Dauvillier est pour sa part avare en dialogues mais peu importe, car les silences qu’il impose valent tous les discours. Le recueil, en noir et blanc, joue beaucoup sur les différents tons de gris ce qui apporte au final une belle variété de contrastes.
De prime abord, cette BD semble être une sorte d’OVNI inclassable. Mais au bout du compte, on ressort de ce petit livre ému, touché par ces deux personnages, par la justesse d’un récit tout en finesse.

Mamé, Loïc Dauvillier et Deborah Pinto, éditions 6 pieds sous terre, 2008. 32 pages. 6 euros. 


L'info en plus : Depuis cette premiere publication, Deborah Pinto a illustré plusieurs ouvrages pour les éditions Milan Jeunesse. Le tout nouveau paraît cette semaine et s'intitule Mon livre animé de Noël. C'est un livre interactif pour comprendre et préparer Noël, avec des animations : volets, roues, peignes, tirettes...




Une BD lue dans le cadre du challenge Pal Sèche.


mercredi 20 octobre 2010

Jojo T18 : Mamy Blues

Mamy est patraque. Un petit coup de déprime. Mais quand elle s’écroule dans la cuisine victime d’un malaise, son fils l’envoie à la clinique pour faire un check up complet. Dans la salle d’attente, pendant que Mamy subit des examens, Jojo tombe sur un concours dans un magazine. Le premier prix est une croisière en méditerranée. Ni une ni deux, il remplit le bulletin de participation et l’expédie par la poste. Le verdict tombe quelques jours plus tard, Mamy, Jojo et Gros Louis sont les grands vainqueurs du concours ! Les voila donc partis pour un voyage de quatre jours avec des escales en corse et en Italie. Mamy n’est toujours pas dans son assiette, Gros Louis doit faire face à un terrible mal de mer et Jojo est frappé de plein fouet par une étrange maladie qui lui fait papillonner l’estomac à chaque fois qu’il croise une ravissante petite peste prénommée Mado. Cette croisière pour le moins mouvementée se terminera évidemment bien pour tout le monde malgré une terrible tempête finale.

J’ai encore du mal à croire que cette 18ème aventure de Jojo est la toute dernière. Depuis son apparition dans le magazine Spirou en 1983 (j’avais 8 ans), le petit bonhomme à la casquette ne m’a jamais quitté. Tous les albums trônent avec fierté dans ma bibliothèque. Et lorsque j’ai appris le décès de son papa, André Geerts, le 27 juillet dernier, ça m’a vraiment fait un choc. Une partie de mon enfance de lecteur qui s’est écroulée, tout simplement. Jojo, c’est la tendresse et la poésie. Des personnages attachants au possible : Mamy bien sûr, Gros Louis, le meilleur copain, sans oublier papa. La série dégage une atmosphère particulière : on a l’impression de sentir les odeurs d’encre et de craie lorsqu’André Geerts dessine une salle de classe. Ses décors ruraux sont aussi exceptionnels. La campagne où vit Jojo m’a fait rêver et m’a donné envie d’y être, moi l’indécrottable citadin. Parmi tous les albums, Un été du Tonnerre est mon préféré. Jojo y passe des grandes vacances à la ferme, et il se dégage de cette escapade estivale un charme incomparable.

Le trait d’André Geerts rappelle parfois celui de Sempé (Le petit Nicolas). Les détails fourmillent, les couleurs sont douces, le découpage simple et efficace. On n’est pas ici dans la démonstration technique. Le but n’est pas d’en mettre plein les yeux au lecteur. Chaque histoire a juste sa propre petite musique, inimitable.

Moins vulgaire que Titeuf, moins gnangnan que Boule et Bill, plus fin que Cédric, Jojo occupe une place à part dans le panorama de la BD jeunesse. En ce qui me concerne, ce gamin malicieux restera à jamais dans mon panthéon personnel. Merci pour tous ces bons moments de lecture, Monsieur Geerts.

Jojo T18 : Mamy Blues, d’André Geerts et Sergio Salma, Éditions Dupuis, 2010. 56 pages. 9,95 euros.



L’info en plus : Sergio Salma et André Geerts ont créé une autre série pour les jeunes lecteurs au début des années 90. Mademoiselle Louise raconte le quotidien d’une petite fille dont le papa multimilliardaire lui offre toujours plus de cadeaux. Mais, c’est bien connu, l’argent ne fait pas le bonheur et la petite rêve seulement d’une existence normale où son papa serait là tous les jours et où elle pourrait jouer avec les autres enfants de son âge. Une très jolie série qui compte en tout quatre volumes, toujours chez Dupuis.



Lu dans le cadre du Challenge Pal sèche 


La BD du mercredi, c'est chez Mango


lundi 18 octobre 2010

Rentrée littéraire 2010 (épisode 7) : Frères de sang

Bronx, années 70. A bientôt 18 ans, Stony va devoir faire le bon choix. A sa sortie du lycée, seule une fac du fin fond de la Louisiane est prête à l’acceuillir pour qu’il poursuive ses études. L’armée ? Pas question. Seule solution restante : suivre les traces de son père et devenir électricien sur les chantiers. Sa rencontre avec un médecin va bouleverser sa vision de l’avenir et l’engager sur une voie professionnelle bien différente de la volonté paternelle. Mais peut-on échapper à sa destinée ?

Second roman de Richard Price publié aux Etats-Unis en 1976, cette œuvre de jeunesse sonne comme un uppercut à la pointe du menton. Une chronique familiale dressant le portrait d’une « tribu » italo-américaine dont chaque membre est un cas à part entière. Entre le petit frère anorexique, la mère psychopathe, le père et l’oncle infidèles, Stony à fort à faire. L’amour filial est le thème central du roman. Stony est pris au piège. Il le sait mais tente de se convaincre du contraire. C’est une sorte de héros tragique : dès le départ on se doute que quoi qu’il fasse, il ne pourra en aucun cas changer le cours de son destin.

Un texte cru, violent, sans concession. Les dialogues sont magistralement ciselés et l’atmosphère si typique du Bronx parfaitement rendue. Richard Price est sans conteste à classer parmi les très grands écrivains américains de la seconde moitié du 20ème siècle. On pense évidemment au Selby de Last Exit to Brooklyn. Pour les dialogues, la comparaison est à chercher du coté d’Ed Mc Bain ou de Chester Himes. Loin, très loin des écrivains du Montana et du Nature Writing, Price distille une prose urbaine qui fait mouche. Voila la littérature américaine comme je l’aime : moderne, sauvage et totalement décomplexée !

Frères de sang, de Richard Price, Presses de la cité, 2010. 392 pages. 21 euros.

L’info en plus : Richard Price n’est pas seulement romancier, c’est également un scénariste de talent. Il a notemment signé le scénario de La couleur de l’argent, un film de Martin Scorcese.

Un très grand merci à Babelio et aux Presses de la cité de m’avoir fait découvrir ce superbe roman !


Challenge du 1% littéraire


vendredi 15 octobre 2010

Pandala T1

Sur l’île de Pandala, le village des Pandawas est dévasté et tous les habitants tués par une mystérieuse horde d’assaillants. Pandhravan, un jeune panda absent au moment des faits est le seul rescapé. Devenu orphelin, il part avec pour seul souvenir un morceau de pendentif récupéré dans la main de son père. Recueilli par un maître en arts martiaux, il commence un dur apprentissage dans le but de venger les siens…

Pandala est une œuvre pour le moins surprenante. Inspiré du jeu en ligne Dofus, ce spin-off se caractérise essentiellement par son absence de texte. 96 pages sans aucun dialogue ! Un tel parti-pris est risqué, car vouloir faire reposer la compréhension de l’intrigue uniquement sur la lecture de l’image demande une maîtrise parfaite de la narration propre à la BD. Mais force est de reconnaître que le pari est ici réussi. Le découpage est d’une fluidité rarement vue. L’alternance des types de plan (du plan d’ensemble au très gros plan) permet notamment de donner beaucoup de dynamisme aux différents événements qui se succèdent. Les combats sont eux-aussi très réussis : tout semble chorégraphié comme dans les meilleurs films d’arts martiaux.

Au niveau du dessin, le travail en couleurs directes sur les décors est un pur régal : les grands espaces, les lumières magnifiques... J’ai un peu plus de mal avec les personnages. On a parfois l’impression d’avoir sous les yeux les celluloïds utilisés par les studios d’animation. Attention néanmoins : Pandala est tout sauf un anime comics !

Du coté du scénario, ça sent le déjà vu à plein nez. L’intérêt majeur réside dans le nombre de clins d’œil et de références dont ce premier volume est truffé. Le début de l’histoire avec le village détruit fait penser à Conan le Barbare. Puis l’apprentissage avec le maître dans la montagne au pied de la cascade m’a rappelé quelques scènes des Chevaliers du zodiaque (notamment l’entraînement de Shiryu, le chevalier du dragon). Le maître panda à des faux airs du Tortue Géniale de Dragon Ball tandis que la transformation du renard en super combattant évoque les Super Sayians de cette même série. On pourrait aussi citer Gon, ce petit dinosaure héros du manga du même nom qui, lui aussi, évolue dans un décor naturel et dont les histoires ne comportent aucun texte ni dialogue. Mais l’influence principale, d’un point de vue graphique, est sans conteste à chercher chez Miazaki. L’hommage est évident et Bertrand Hottin n’a jamais caché son admiration pour le maître des studios Ghibli.

En conclusion, Pandala est une œuvre à la fois originale et magnifique au niveau esthétique. Et même si le scénario reste assez léger et très convenu, les aventures de ce petit Panda méritent assurément le coup d’œil.


Pandala T1, de Tot et Bertrand Hottin, éditions Ankama, 2007. 96 pages. 12,90 euros.

L’info en plus : Le cycle de Pandala s’est conclu avec la parution du 3ème tome de la série en juin 2009. Depuis un peu plus d’un an, Bertrand Hottin s’est lancé dans une nouvelle aventure avec Les chroniques d’Ecaron. Pour l’instant, cette nouvelle BD n’est visible que dans le mensuel Dofus Mag. Il n’y a pas de date de sortie prévue pour un éventuel album.

Les deux premières planches



lu dans le cadrde du challenge Pal sèche