mercredi 13 décembre 2017

Ma guerre, de La Rochelle à Dachau - Tiburce Oger

8 mai 2015. Guy-Pierre Gautier est fait Chevalier de la légion d’Honneur devant le monument aux morts de La Roche-sur-Yon, en Vendée. Guy-Pierre Gauthier est le grand-père du dessinateur Tiburce Oger. La cérémonie va servir de déclic à celui qui, jusqu’alors, n’était jamais revenu sur la douloureuse jeunesse qui fut la sienne entre 1940 et la libération. En se confiant à son petit-fils, le vieil homme rouvre une plaie béante, et tandis que les souvenirs affluent, la parole se libère.

Entré en résistance à 17 ans, il commence par distribuer des tracts avant de participer à quelques sabotages. Arrêté par la gestapo, il est d’abord détenu à la centrale d’Eysses, avant d’être déporté à Allach, le camp annexe de Dachau. Sur place, il connaît l’enfer. La faim, le froid, le typhus, la violence des capo, une hygiène et des conditions de vie abominables seront son quotidien jusqu’à l’arrivée des américains. De retour en France à l’été 45, pesant à peine 35 kilos, le déporté va difficilement retrouver sa place dans la société.

Encore une BD sur les camps de la mort. Une de plus me direz-vous. Certes. Mais à l’instar de Maus ou de Moi, René Tardi, prisonnier de guerre, ce témoignage relayé et mis en images par un proche possède une force particulière. Le parcours personnel prend une valeur universelle et le dessinateur a l’intelligence d’axer son propos davantage sur la solidarité et l’entraide entre prisonniers plutôt que sur les exactions des bourreaux. Il se dégage de l’album, malgré les horreurs racontées, une lumière baignée d’humanité où, si l’espoir ne tient qu’à un fil, il reste présent. La force mentale et l’instinct de survie de certains sont soulignés avec une dignité qui évite tout virage vers le pathos ou la dramatisation à outrance.

L’album dit aussi la honte  de « s’en être sorti » qui a submergé les rescapés alors que tant de leurs camarades ont péri, ainsi que leur volonté, après coup, de ne pas en rajouter par rapport à ce qu’ils avaient vécu et l’impossibilité de partager ce vécu au moment du retour à la vie civile. Une BD poignante et pleine d’émotion maîtrisée.

Ma guerre, de La Rochelle à Dachau de Tiburce Oger. Rue de Sèvres, 2017. 80 pages. 17,00 euros.


Toutes les BD de la semaine sont à découvrir aujourd'hui chez Noukette.








44 commentaires:

  1. J'ai tendance à freiner des quatre fers quand il s'agit de récit sur cette période. Pourtant c'est un album à lire semble-t-il. Pas une fausse note dans les retours de lecteurs du moins, je n'ai pas le souvenir d'avoir lu une chronique négative sur ce titre. Et ton avis vient confirmer la qualité du récit.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Héhé encore tout pareil que Mo chéwie !
      Alors du coup je doute, est ce que je me lancerai pas ? On verra si on se la dégote à Angoulême ;-)
      Des bises immenses jeune homme <3

      Supprimer
    2. Franchement, vous pouvez vous lancer les yeux fermés les filles, vous ne le regretterez pas !

      Supprimer
  2. Un album qui nous a touché, nous aussi, sur "Un Amour de BD".

    RépondreSupprimer
  3. Un album qui me touchera, je le sais! Noté donc!

    RépondreSupprimer
  4. j'avais beaucoup apprécié ma lecture aussi et la justesse du récit !

    RépondreSupprimer
  5. Et tu penses que je pourrais la proposer à mes élèves...? Il va falloir que je la découvre en tous cas !

    RépondreSupprimer
  6. Je ne doute pas de l’intérêt de cette BD mais pour l'instant la période ne me fait pas envie... J'y reviendrai sûrement ! Merci pour cette belle référence.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Disons que ce n'est pas forcément une lecture idéale pour les fêtes ;)

      Supprimer
  7. Bonjour Jérôme, je ne fais que passer... Le sujet de cet album n'est pas pour moi.

    RépondreSupprimer
  8. C'est une période qui m'intéresse beaucoup, je lis énormément de romans et de bd la concernant, je ne m'en lasse pas! Cette bd passera alors par moi!

    RépondreSupprimer
  9. Oh là là, je ne connaissais pas. Je suis vendéenne et au collège, nous faisons venir un grand-père qui a suivi le même parcours que celui de la BD. Peu de personnes sont encore en vie pour témoigner. Toujours bouleversant pour les élèves. Je note...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il faut absolument que cet album arrive au CDI alors !

      Supprimer
  10. Je note , en BD j'aime bien joindre l'utile à l'agréable !

    RépondreSupprimer
  11. Je commence Semprun ce soir, alors c'est dans mon thème et je crois n'avoir jamais lu de BD sur les camps si j'excepte Maus. Les dessins me plaisent beaucoup.

    RépondreSupprimer
  12. Rhooo mais c'est vrai j'avais complètement oublié cette BD qui se déroule en partie à La Roche sur Yon (ma ville ;)). Il faut que je la lise...

    RépondreSupprimer
  13. Je fais une pause sur la deuxième guerre mondiale ! Ce qui n'enlève rien à l'intérêt de cette bande dessinée évidemment ... je note pour fiston, il va finir par avoir plein de BD de chez toi pour son Noël ce gosse. ...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. L'idée qu'il reçoive des BD à Noël me réjouit, tu peux pas savoir^^

      Supprimer
  14. Merci pour cette découverte. Mon neveu de 18 ans habite à La Rochelle, je pense que ça ne peut que l'intéresser.

    RépondreSupprimer
  15. C'est vrai que ce n'est pas trop ma thématique du moment, surtout que j'ai déjà casé le Sébastien Spitzer il y a peu, mais bon, ton enthousiasme est tout de même motivant et apparemment les retours sont bons. J'aimerais bien (re)lire Maus avant tout de même. Je m'étais arrêtée au tome 1 à l'époque, faute d'avoir le 2 sous le coude, mais j'ai l'intégrale dans ma PAL depuis plusieurs mois...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai aussi laissé traîner l'intégrale de Maus dans ma pal pendant un bout de temps. Mais quelle claque j'ai pris après l'en avoir enfin sorti !

      Supprimer
  16. C'est rassurant de voir qu'alors que les survivants se font logiquement de plus en plus rares, la parole - et le souvenir - se transmet

    RépondreSupprimer
  17. Pas vraiment envie de lire des livres sur ce genre de sujet en ce moment...

    RépondreSupprimer
  18. Je note cette BD, à voir si elle peut convenir aux ados.

    RépondreSupprimer
  19. J'ai l'impression que je ne serai jamais lassée de ce thème et j'ai très envie de découvrir cet ouvrage.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pour moi il faut juste que le thème soit parfaitement traité, et c'est le cas ici.

      Supprimer
  20. Merci beaucoup pour cette critique et les commentaires très sympas. Une exposition aura lieu à Angoulême pendant le festival et le papy et moi dédicaceront l'album. Tiburce

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je ne peux malheureusement pas aller à Angoulême cette année, c'est dommage, j'aurais adoré pouvoir discuter avec votre papy et vous.

      Supprimer
  21. Un sujet qui me fait toujours peur... Mais je note pour la bib. A partir de quel âge peut-on la conseiller ?

    RépondreSupprimer

Je modère les commentaires pour vous éviter les captcha pénibles de Google. Je ne filtre rien pour autant, tous les commentaires sans exception seront validés au plus vite, promis !