lundi 31 mars 2014

Plume le lutin - Laurence Puidebois et Nicolas Lacombe

Plume est un lutin bienveillant et altruiste. Chaque fois qu’il croise la route d’un animal, il cherche à lui venir en aide grâce à la plume qui orne son chapeau. C’est ainsi qu’il chatouille l’élan pour lui redonner le sourire, qu’il caresse le crapaud en mal de câlin, qu’il permet à l’hermine d’écrire à son amoureuse ou encore qu’il rafraîchit la tortue en lui faisant du vent.

Chaque rencontre s’étale sur deux doubles pages, dans un petit format à l’italienne confortable et simple à manipuler. Une histoire en randonnée classique pleine de bons sentiments, au final assez surprenant.


Mais le charme de cet album tient sans conteste aux incroyables illustrations de Nicolas Lacombe. Je dis incroyables parce que j’ai eu l’occasion de le voir à l’œuvre lors du dernier salon du livre et je n’en suis toujours pas revenu. Pour donner vie à Plume et aux animaux, il n’utilise ni stylo, ni pinceau, ni tablette graphique. Il a juste besoin d’un rouleau de scotch, d’un cutter et de catalogues ou de magazines. Avec ces trois ingrédients, il a réalisé l’ensemble de l’album. J’étais avec Noukette quand nous lui avons demandé un dédicace et il nous a expliqué qu’il était le seul a utilisé ce procédé. Avec le scotch, il prélève la couleur puis découpe la forme souhaitée au cutter et colle le bout de scotch sur la feuille. La trace laissée par ses doigts sur l’adhésif donne un relief particulier à l’œuvre qui prend forme petit à petit. C’est juste bluffant.

Une petite vidéo extraite de son blog :



Plume le lutin de Laurence Puidebois et Nicolas Lacombe. Balivernes, 2014. 30 pages. 9,00 euros. A partir de 4-5 ans.

Une lecture commune que je partage évidemment avec Noukette.




samedi 29 mars 2014

Le tort du soldat - Erri De Luca

Deux narrateurs dans ce court récit de mon écrivain italien préféré. Le premier s’est rendu à Aushwitz et Birkenau 50 ans après la shoah et en est revenu totalement bouleversé. A tel point qu’il a décidé d’apprendre le Yiddish, une langue moribonde : « Le Yiddich a été mon entêtement de colère et de réponse. Une langue n’est pas morte si un seul homme au monde peut encore l’agiter entre son palais et ses dents, la lire, la marmonner, l’accompagner sur un instrument à cordes ». Alors qu’il est en train de travailler à la traduction en italien d’une nouvelle d’Israel Joshua Singer, frère du prix Nobel Isaac Bashevis, son regard croise celui d’une femme et d’un homme, attablés dans le même restaurant que lui. Une fille et son père. Elle sera la narratrice de la seconde partie du récit et expliquera que son père est un criminel de guerre nazi caché depuis des années sous un uniforme de facteur autrichien. Un criminel qui, en voyant dans le même lieu que lui une personne lisant des feuilles couvertes de caractères hébraïques, va se sentir menacé...

Encore et toujours la plume sensible et délicate de De Luca. Elliptique aussi, le texte se présentant sous forme de courts paragraphes, comme autant de petites touches qui composeront le tableau final. Un tableau dont la mémoire et la responsabilité sont à l’évidence les thèmes centraux.

La voix de la jeune femme est d’une justesse bouleversante. Elle raconte son histoire, ce père qu’elle a longtemps cru être son grand-père et avec lequel elle vit depuis toujours. Le vieux nazi n’a qu’un seul regret, celui d’avoir perdu ; « je suis un soldat vaincu, tel est mon crime. Le tort du soldat est la défaite. »  De son coté, elle voit les choses aussi simplement que sincèrement : « Je n’avais rien à voir avec sa vie d’homme caché, je m’étais simplement occupé de lui. »

Mais une telle vie aura forcément influencé sa relation aux hommes : « Je crois avoir été une bonne fille. J’ai pris soin d’un vieux père. J’ai respecté sa vie cachée, je ne l’ai pas dérangé par un mariage. Je n’ai pas été une religieuse, je n’ai pas pratiqué la chasteté. J’ai attendu des hommes les mains qui, enfant, m’allégeaient en me mettant sur un lit d’eau et de doigts. Aucun ne m’a comblée. Ils pénétraient par poussées, plongeaient en moi qui nageais sur le dos sous le lest de leur corps. [...] Aucun garçon, aucun homme n’avait atteint la surface où battent mes palpitations. Ils avaient plongé leurs corps dans mes entrailles, ils m’avaient creusée par leurs étreintes. Mais ma vie était sur ma peau, mon sens majeur était le toucher, qui a son siège partout entre la tête et les pieds. »                           

Un long extrait qui souligne la beauté de la prose de De Luca. Je ne suis pas objectif parce que je suis fan de cet écrivain, tout à fait fan. Mais avouez quand même que sa petite musique laisse en bouche un goût délicieux...

Le tort du soldat d’Erri De Luca. Gallimard, 2014. 90 pages. 11,00 euros.

L’avis de Marilyne




vendredi 28 mars 2014

Bordel - Sophie Bonnet

Un bordel. En suisse. Un truc officiel, dans les règles. Quinze chambres, une vingtaine de filles. Le client fait son choix dans un menu sur lequel sont affichés les prestations et les tarifs. Il paie à l’avance et s’il veut rajouter des prestations par la suite, il peut le faire depuis la chambre.

« Les filles se présentent aux clients plus de douze heures par jour et sortent très peu du salon. La plupart travaillent la nuit. Elles arrivent dans l’après-midi et se préparent lentement. Dès 18 heures, elles sont habillées, coiffées, maquillées, mais beaucoup semblent écrasées de fatigue. Levées depuis quelques heures à peine et pourtant complètement éteintes. Elles attendent, affalées sur les fauteuils en cuir de la salle commune. Les premières sonneries de client vont donner le signal du départ. Le business commence. »

La plupart de ces filles arrivent de France. Elles sont très jeunes, entre 18 et 22 ans. Rares sont celles de plus de 30 ans. Beaucoup sont des maghrébines venant de cités sensibles. Elles sont là 3 ou 4 jours par semaine et rentrent incognito dans leurs familles. Elles peuvent toucher jusqu’à 15 000 euros par mois. « L’impossibilité d’évoquer l’argent gagné et de partager leur réussite matérielle avec leurs proches les pousse à faire disparaître les sommes gagnées. » Bijoux, drogues, fringues, chaussures, sacs à main de luxe, elles claquent tout. Seules quelques unes ont l’intelligence de garder une partie de leur salaire pour des projets concrets comme l’achat d’une voiture ou d’un appartement. Entre elles, c’est au pire une compétition sans pitié, au mieux une cohabitation forcée. Jamais elles ne donnent leur véritable identité et certaines disparaissent du jour au lendemain. Le turnover est important et la « gérante» de la maison clause reçoit chaque jour de nouveaux CV.

Sophie Bonnet, journaliste d’investigation pour l’agence Capa, a enregistré, avec leur accord, les conversations tenues par les filles. Le résultat est effarant, tant les banalités s’enfilent comme des perles. De celle qui se plaint de ne plus avoir de Red bull (une boisson qu’elles ingurgitent à longueur) aux défilés de mode improvisés pour montrer aux copines les derniers achats en date en passant par les chamailleries dignes d’une cour de récré et les réflexions philosophiques à deux balles, on reste au ras des pâquerettes. On a aussi droit à quelques entretiens d’embauche pas piqués des hannetons où les postulantes cochent dans une grille les prestations qu’elles acceptent de faire : « Tu fais la sodomie ? » ; « Tu suces ? » ; « Tu embrasses ? ». « Oui, ils adorent embrasser. Moi ça me dégoûte un peu, mais bon, je le fais quand même parce que aujourd’hui on n’a plus vraiment le choix. En suisse, tu ne peux plus travailler dans un seul salon si t’embrasse pas. De toute façon, tu leurs suces bien la bite, donc embrasser, après tout, c’est moins gênant. »  (perso je ne suis pas certain de ça, mais bon…)

Les filles passent aussi leur temps à dire du mal des clients (ce que je peux comprendre) et les gérants en font autant à propos de leurs "employées" (ce qui est déjà beaucoup plus lamentable). Du glauque, du glauque, du glauque… et une petite nausée qui vous monte au fil des pages. Le gros problème c’est qu’il n’y a rien de passionnant là-dedans, tout sonne creux à part les premiers chapitres expliquant le fonctionnement du bordel, l’origine et la motivation des filles (bon en fait, soyons clair, la motivation c’est l’argent et rien d’autre. Aucune, absolument aucune ne fait ça pour le plaisir. Je précise juste au cas où certains en douteraient encore).

Bref, après ma lecture de « Pornstar », ce « Bordel » confirme une évidence : le commerce du sexe est un milieu en tout point sordide.


Bordel de Sophie Bonnet. Belfond, 2014. 212 pages. 18 euros.


L'avis de Canel


mercredi 26 mars 2014

Clair-obscur dans la vallée de la lune - Mongermont et Alcante

1998. José est guide touristique sur les hauts plateaux chiliens. D’habitude il encadre des groupes mais il se retrouve pour la première fois avec une seule et unique cliente, Joan, jeune femme insouciante et pleine de peps. Cette américaine à la chevelure flamboyante agace José autant qu’elle le trouble. Lui est un homme taciturne, torturé par un passé que l’on sent particulièrement douloureux. Ensemble, José et Joan vont peu à peu s’apprivoiser et les rôles s’inverser, le guide n’étant pas forcément celui que l’on croit.

Une très belle histoire. Je vous arrête tout de suite : non, Joan et José ne vont pas tomber amoureux l’un de l’autre, c’est beaucoup plus fin. Il est torturé par la haine et la vengeance et ne peut se libérer des terribles souvenirs laissés par la dictature de Pinochet. Elle, derrière le sourire et la bonne humeur de façade, porte les stigmates d’un drame personnel effroyable. Leur rencontre aura un effet cathartique et permettra à chacun, enfin, d’imaginer une possible reconstruction.

Si l’album est aussi somptueux, c’est parce que le dessin est à la hauteur du texte. Quels décors, quelle lumière, quelles couleurs ! Il se dégage de l’ensemble une vraie poésie douce-amère, où les silences en disent bien plus que de longs discours.

Un récit sensible qui avance par petites touches et amène de la clarté dans des existences meurtries. Une totale réussite !

Clair-obscur dans la vallée de la lune de Mongermont et Alcante. Dupuis, 2012. 64 pages. 15,50 euros.

Un album offert par Cristina. Je la remercie pour cette gentille attention et pour la pertinence de son choix.

Les avis de Cristina et Yvan.



mardi 25 mars 2014

Un de perdu - Gilles Abier

D’un coté Mélanie, une maman inconsolable depuis la disparition de son fils Clément pendant les fêtes de la ville de Bègles. C’était il y a cinq ans. De l’autre Enzo, un enfant en souffrance, victime d’une terrible forme de maltraitance que j’appellerais « l’indifférence parentale ». Des parents qui selon lui ne le méritent pas, des parents face auxquels il a l’impression d’être de trop. Enzo a douze ans, l’âge qu’aurait Clément. En voyant la photo de ce dernier affichée dans le hall de la gare de Périgueux, il découvre avec surprise qu’il lui ressemble de manière frappante. Je vous laisse imaginer la suite…

Pour tout vous dire, j’ai eu peur, très peur. Peur que tout cela ne tienne pas debout, que les grosses ficelles soient bien trop apparentes. Une impression qui a d’abord eu tendance à se confirmer mais qui, au fil du texte, s’est évaporée. Parce que Gilles Abier tricote son intrigue serrée-serrée, évitant les faux pas. Il vous ballade un peu, il alterne entre la rencontre Mélanie-Enzo et les  jours qui ont précédé. La mayonnaise prend davantage à chaque page et au moment de conclure, alors que l’on pense voir le soufflé retomber, le récit gagne en intensité et la fin est parfaitement trouvée selon moi.

Une thématique forte et un texte dense, voila un petit roman ado qui rentre parfaitement dans le cadre du nouveau rendez-vous que nous souhaitons vous proposer Noukette et moi. Et je peux déjà vous dire que l’on a d’autres cartouches sous le coude pour les semaines à venir…

Un de perdu de Gilles Abier. Sarbacane, 2013. 64 pages. 6,00 euros.

Les avis de Noukette et de Sophie/Hérisson

lundi 24 mars 2014

Mon salon du livre...

Je vais vous la faire courte parce qu'il est impossible de résumer de façon exhaustive une telle journée (et c'est tant mieux). Alors en vrac et en résumé, mon salon a consisté à :



Récupérer sur le stand des éditions du Rouergue un badge que je vais porter à longueur de journée.








Avoir, en compagnie de Stephie et Noukette, une jolie discussion avec Antoine Dole à propos de son dernier roman jeunesse que nous n'avions pas épargné sur nos blogs et qui a pris la chose avec plus ou moins de philosophie (mais aussi beaucoup d'humour, ce qui est le principal).







Trouver chez Gründ un parfait petit livre pour Charlotte et y rencontrer la charmante Caroline.









M'asseoir quelques minutes à coté d'Angela Morelli et repartir avec une bien belle dédicace pour "Jérôme chouchou".









Faire un détour le stand de la région Picardie pour saluer les éditions de la Gouttière et Isabelle de Liroli qui m'a promis de m'amener dans la semaine son nouveau recueil d'Haïkus dédicacé pour pépette n°2.








Dénicher le tout petit stand de Monsieur Toussaint Louverture et échanger avec lui à propos de Mailman et de la collection La belle colère (Dieu me déteste).










être fasciné par le travail de Nicolas Lacombe, le seul illustrateur qui réalise ses albums entièrement au scotch. Il faut le voir pour le croire mais la dédicace ci-contre a été faite uniquement avec du scotch et un cutter.
(Ses albums sont publiés par Balivernes)







Aller comme tous les ans faire un coucou à mon éditeur chouchou et découvrir le regard plein d'esprit et de finesse porté par une attachée de presse sur les blogs et leur "utilité" (Anne-Charlotte, encore merci pour la pertinence et l'intelligence de votre discours).




Passer un moment avec Stephie et recevoir un colis "Mille et un Frasques" qui, comment l'avouer simplement, m'a enchanté à tout point de vue. Et non, je ne vous dirais pas ce qu'il y avait sous ces papiers cadeau mais sachez que :
1) sa réputation de grande prêtresse des premiers mardis coquins n'est pas usurpée.
2) il y avait dans le lot un livre mystère !


Croiser plus ou moins longtemps Aifelle, Laurie et Sophie et constater une fois de plus que les blogueuses sont toutes plus gentilles les unes que les autres.

Et comment ne pas finir ce très court compte rendu sans remercier ma chère Noukette, avec laquelle j'ai arpenté en long et en large les allées du salon et qui a, comme d'habitude, été une partenaire idéale. Pour ne rien gâcher, on a fait ensemble de belles trouvailles et vous pensez bien que l'on va se concocter quelques lectures communes dans les semaines qui viennent.





dimanche 23 mars 2014

Les bonnes gens - Laird Hunt

1911. Ginny est une vieille femme blanche au service de Lucious Wilson depuis des années. Elle se rappelle qu’avant d’arriver dans l’Indiana, elle fut mariée à Linus Lancaster, un petit cousin de sa mère. Un homme qui l’emmena au fin fond du Kentucky, dans une ferme surnommée « le paradis ». Elle s’y installa au début des années 1850 alors qu’elle n’avait que 14 ans. Dans ce « paradis », Linus exploitait sans vergogne des porcs et quelques esclaves, les premiers étant bien mieux traités que les seconds. Parmi eux deux sœurs, Zinnia et Cleome, à peine plus âgées que Ginny. Deux sœurs qui formèrent sa seule compagnie et qui, le jour où le maître alla les rejoindre dans leur lit, devinrent d’abord des ennemis, puis des souffres douleur. Se mettant au diapason de son terrible époux, Ginny se transforma peu à peu en monstre de cruauté. Mais lorsque le règne du tyran s’acheva dans le sang, les esclaves endossèrent les habits du bourreau et les rôles s’inversèrent…

Il se dégage de l’écriture de Laird Hunt une impression de puissance assez exceptionnelle. Une grande maîtrise de la narration aussi. L’enchevêtrement des époques, la sincérité des différentes voix qui s’expriment, la violence, à la fois suggérée et terriblement réelle, tout cela donne un texte aussi riche qu’hypnotisant.

L’inversement des rôles, le passage des victimes en bourreaux, relève quelque part de la métaphysique. La quatrième de couverture parle de « partition sans fin de la redoutable réversibilité du mal » et je crois que c’est exactement de cela qu’il s’agit. La vengeance se fait sans aucun plaisir et sans véritable haine, elle découle simplement d’une forme d’évidence. Une obsession douloureuse à laquelle Zinnia et Cleome ne peuvent se soustraire. Une obsession que finalement Ginny trouve logique. Et le lecteur de plonger avec fascination et dégoût au cœur de l’abomination.

Un roman d’une rare intensité dont on ne ressort pas indemne. Tout ce que j'aime !


Les bonnes gens de Laird Hunt. Actes sud, 2014. 245 pages. 20,80 euros.

Une lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Valérie.






vendredi 21 mars 2014

Dieu me déteste d’Hollis Seamon

Encore un bouquin sur des gamins cancéreux. A croire que c’est devenu une mode. Perso, ça fait mon troisième après « Nos étoiles contraires » et la BD « Boule à zéro ». Heureusement, à  chaque fois la qualité était au rendez-vous et ce « Dieu me déteste » ne dérogera pas à la règle. C’est pourtant sacrément casse-gueule comme thématique. Si on veut faire pleurer dans les chaumières, rien de plus facile. Mais si on choisit d’être davantage dans la finesse, d’amener un regard décalé sans nier l’aspect dramatique de la situation, les choses se compliquent.

Le narrateur se prénomme Richard, il aura bientôt 18 ans et il est cloîtré dans le service des soins palliatifs de l’hôpital Hilltop, à New York. Quand on rentre aux soins palliatifs, c’est qu’il n’y a plus rien à faire. Trente jours maximum avant de « tirer le rideau ». Richard se sait condamné mais il va ruer dans les brancards. Parce qu’avant d’être un malade en fin de vie, c’est surtout un ado. Un ado qui voudrait profiter au maximum du peu de temps qui lui reste, quitte à foutre un sacré merdier dans un service d’habitude si policé. Pas qu'il soit un perturbateur né, loin de là. C'est juste qu’il ne supporte pas le carcan irrespirable dans lequel on l’enferme. Et puis il voudrait aussi se rapprocher de Sylvie, la patiente de la chambre 302. Sylvie a 15 ans. Une vraie complicité les unit, et un peu plus que ça même. Sylvie, elle est comme lui, elle veut choper tous les jours qui lui restent comme une acharnée. Et ensemble, ils vont tout faire pour mener à bien la mission amoureuse qu’ils rêvent de voir aboutir…

« Dieu me déteste » est la chronique impertinente d’un gamin indocile et pétillant, drôle et lucide. Un gamin qui souffre, et pas qu’un peu, mais je trouve que la maladie n’est pas le sujet principal. Leur vraie guerre, Richard et Sylvie la mènent contre des adultes surprotecteurs et rabat-joie. Parce que même si le corps les lâche, il leur reste suffisamment d’énergie et de vitalité pour chercher à assouvir ce désir qui les titille. Il y a dans leur comportement une sorte d’acharnement, et leur obstination relève d’une urgence bien compréhensible. Mais les obstacles qui se dressent devant eux sont innombrables. Heureusement, ils vont aussi trouver quelques complices bienveillants comme l’oncle Phil, la grand-mère de Richard ou quelques membres du personnel hospitalier. L’intérêt du roman tient d’ailleurs pour beaucoup dans la richesse des personnages secondaires qui gravitent autour de nos tourtereaux.  

Ça peut sembler étrange mais on ressort revigoré d’une telle lecture. Je ne peux pas nier que j'ai eu la gorge serrée par moments mais au final, j'ai trouvé que ces Roméo et Juliette modernes nous offraient une sacrée leçon de vie. Une belle leçon d'optimisme aussi. Et ce n'est pas du luxe par les temps qui courent.


Dieu me déteste d’Hollis Seamon. La belle colère, 2014. 285 pages. 19,00 euros.

Une lecture commune que je partage avec Karine, Liliba, Noukette et Stephie.


Les avis de Clara et La Sardine.





jeudi 20 mars 2014

Mon second livre mystère - ????????

Voila. J’ai reçu et lu mon second livre mystère. Dévoré même. Facile, il était du genre maigrichon. Mais bon, c’est pas la taille qui compte, heureusement. Face la bête, recouverte en bonne et due forme, je me suis senti moins déstabilisé que la première fois. Peut-être parce que je commence à devenir un vieux briscard de l’exercice. Mais surtout,  je n’ai pas eu envie de me poser la moindre question. Juste profiter du plaisir de me lancer dans un livre choisi pour moi par quelqu’un qui me connait très bien. Parce que l’expéditrice n’était pas mystérieuse, elle. Et pour le coup, je n’avais aucune inquiétude, juste la certitude que ça allait me plaire.

L’histoire se passe à Bruxelles. Enfin, les histoires. Deux histoires à priori sans rapport. Celle de Thomas et Marie, des tourtereaux fauchés qui vivent dans un taudis loué par un affreux marchand de sommeil. Marie est très malade, alitée en permanence. Le couple doit partager son appartement avec des jumeaux albanais et deux familles, les Varoum et les d'Anchuso, dans une promiscuité totale. Les temps sont durs, le loyer n’est plus payé depuis des lustres et l’expulsion les guette. En parallèle on suit Serge, un chômeur un peu glandeur qui va perdre son ami Toni dans des circonstances effroyables dès les premières pages. Par la suite, Serge va s’improviser plombier et rencontrer Louise. Une divine surprise à laquelle il n’était à l’évidence pas préparé.

Les  chapitres présentent tour à tour les pérégrinations de Serge et la situation catastrophique de Thomas et Marie. Aucun lien entre ces différents personnages à première vue, jusqu’au moment où l’on comprend que c’est Thomas qui raconte l’histoire de Serge (je ne sais pas si j’explique les choses clairement mais dans le livre, c’est limpide). A partir de là, le roman prend une autre dimension, belle et tragique. C’est parfaitement amené, j’avoue que je n’ai rien vu venir.

Je suppose que l’auteur est belge, pas seulement parce que ça se passe à Bruxelles mais parce que son vocabulaire ne laisse pas planer d’ambiguïté (qui d’autre qu’un belge écrirait « septante » ! ). Je parierais sur un homme car l’écriture me semble très masculine (même si je serais bien incapable de définir précisément ce qu’est une écriture masculine). En tout cas c’est une écriture à la fois orale et travaillée, fluide et imagée comme j’aime.

Le ton est pessimiste sans être désespéré. Il relève plutôt d’une certaine forme de réalisme. Le regard porté sur le monde, les gens, la vie, n’est pas des plus joyeux mais je l’ai trouvé d’une grande lucidité. Surtout, ce roman nous raconte une magnifique histoire d’amour. Pure et forcément triste aussi. Une histoire sans cynisme, d’une sincérité bouleversante. Une histoire qui m'a énormément plu et a essoré mon petit cœur de pierre.

Finalement, c’est ce que j’adore avec les livres mystère. On m’embarque sur un terrain où je ne serais jamais allé moi-même. Bien sûr, je peux me dire que j’ai eu de la chance et que je suis à chaque fois bien tombé. Mais ce serait oublier à quel point les livres qui m’ont été adressé ont été choisis avec soin. Mes expéditrices ne se sont pas trompées et je les remercie pour la pertinence de leur choix. Et si la première souhaitait garder l’anonymat, ce n’est pas le cas de la seconde alors, ma très chère Noukette, permets-moi de t’adresser un grand merci et de te faire une tonne de bisous. Tu m’as en quelque sorte rendu la monnaie de ma pièce, et rien ne pouvait me faire plus plaisir.

En attendant, à l’heure qu’il est, je ne connais toujours pas le titre et l’auteur de ce roman… Je reviendrai lever le voile ce soir.

Edit de 18h00 :


Voila, j'ai déshabillé mon livre mystère. C'était "Quatrième étage" de Nicolas Ancion, un auteur dont je n'avais jamais entendu parler auparavant. Une bien belle découverte ! Noukette, je suis partant pour découvrir d'autres titres de ce belge talentueux, si tu veux m'accompagner ce sera évidemment avec plaisir.






mercredi 19 mars 2014

Mamette T6 : Les papillons - Nob

Mamette fête ses 84 ans. En cadeau elle reçoit un « ordonnateur », une box « internette » et un appareil photo « radioactif ». Sa petite fille, avant de s’expatrier à Londres, vient lui donner des cours d’informatique : transférer les photos, les poster sur son mur… tout ça c’est du chinois pour Mamette. La vieille dame se lance aussi dans le yoga avec ses copines, histoire de se relaxer un peu. Et puis sa mémoire lui joue des tours. Elle oublie des mots, elle ne sait plus où elle range ses affaires. Mamette se doute que quelque chose cloche. Surtout, elle se dit qu’en perdant la mémoire elle risque d’oublier son Jacques !

Un sixième album plus grave que les précédents. Mamette grandit encore, elle sent davantage le poids des ans. Son choupinet de fils s’inquiète de la voir décliner physiquement et moralement. Un album qui, sous couvert de perte d’autonomie, laisse une large place à la nostalgie. Mais entendons-nous, si le propos est plus sérieux, l’humour reste bien présent, tout comme la fraîcheur et la gourmandise qui caractérisent cette adorable grand-mère. Finalement, Nob a trouvé une façon intelligente de se renouveler. Sans rien forcer, en déroulant de nouvelles thématiques avec une parfaite évidence. Et puis la dernière page, magnifique de douceur, remet les choses en perspective et rappelle que cette série reste avant tout un hymne à la vie.

Pourquoi le nier, une fois encore je sors enchanté de ce rendez-vous avec Mamette, cette mamy que, décidément, j’aime d’amour. Oui, j’adore Mamette et Bukowski, c’est le grand écart mais je n’y peux rien, ces deux-là sont un peu mon Yin et mon yang.


Mamette T6 : Les papillons de Nob. Glénat, 2014. 48 pages. 10,00 euros.




mardi 18 mars 2014

Ma tempête de neige - Thomas Scotto

C’est un père de 19 ans qui parle à son enfant. Un enfant pas encore né mais auquel il raconte son coup de foudre avec Katell, la maman.
Leur première fois.
Le test de grossesse (« Les deux barres sur le test. J’ai poussé un cri, mais un truc indéfinissable de rage et de plaisir. A partir de là, je voulais que tout le monde le sache. […] Que tout le monde sache que t’étais pas un accident »).
La première échographie (« En revenant je crois que j’ai chialé […] des larmes dégoupillées pour l’explosion, des larmes d’un bruit assourdissant. […] Rien à voir avec la tristesse. Ne crois pas. Mais plutôt… avec Katell… c’était là qu’on changeait vraiment. Sur la quatre voie et dans nos vies »).
L’annonce aux amis et à la famille.
L’avenir...

Un monologue qui semble sortir d’une traite. Pas une plainte non, ni une crainte. Une certitude plutôt : « Je voulais un enfant ». « Ça ne m’a même pas fait peur comme désir. Je pourrais trouver que je suis inconscient. Que c’est une vraie connerie, la pire de toute ma vie et que je vais foutre mes études en l’air. En fait, non… je crois que j’ai de la chance. D’avoir confiance en moi, c’est une chance ». La conclusion ne pouvait que s’imposer d’elle-même, limpide : « On y est. Tu vas arriver. Tu vas naître. Et tu vois comme t’es attendu… tu vois, t’es attendu. »   

C’est beau parce que c’est à la fois sincère et naïf. C’est beau parce que ce n’est pas du tout cucul. Bien sûr ce ne sera pas un long fleuve tranquille et au fond, il se doute que ce bébé va aussi lui faire vivre quelques moments difficiles (écrit celui qui vient de passer une nuit quasi blanche à cause d’une vilaine poussée dentaire). Mais je retiendrai avant tout de ce texte sa justesse de ton. Un cri d’amour, un cri du cœur pas dégoulinant pour deux ronds, une sorte de soliloque nécessaire, pour s’affirmer et se rassurer. Un superbe petit roman, vraiment.

Ma tempête de neige de Thomas Scotto. Actes sud junior, 2014. 58 pages. 9,00 euros. A partir de 14 ans.


Une nouvelle pépite dénichée avec mon incontournable complice Noukette. Ça fait un certain temps que l’on vous parle de textes courts et percutants (Depuis qu'on a déménagé / Candy / Une preuve d'amour / A copier 100 fois). L'idée d'un petit rendez-vous régulier est donc venue d'elle-même. Au gré de nos trouvailles, nous essayerons de vous dénicher des petits romans jeunesse que les ados auront envie de se passer de main en main... et que les adultes n'auront de cesse de vouloir leur piquer...! Ma tempête de neige inaugure de bien belle façon ce nouveau rendez-vous...! 



lundi 17 mars 2014

Les lectures de Charlotte (3) : Oseras-tu chatouiller le loup ? - Emiri Hayashi

Chatouiller le loup, glisser une enveloppe dans la boîte aux lettres, arroser la plante, secouer un arbre, lancer un ballon, caresser le chat… Charlotte a adoré faire tout ça.

Le principe est simple. Une question, une action à effectuer et on soulève un petit rabat pour découvrir le résultat de cette action. Les rabats se lèvent à l’horizontale ou à la verticale selon les situations et la surprise est au rendez-vous à chaque fois sans que jamais la lassitude ne s’installe. Les dessins sont mignons comme tout et le petit format permet à bébé de manipuler le livre tout seul. Un bémol quand même, les rabats sont un peu fragiles. Heureusement, Charlotte n’est que douceur (comme son père) et tourne les pages avec précaution, mais je connais quelques grosses brutes qui auraient vite fait de transformer les volets à soulever en confettis.

Interactif et ludique, ce premier titre de la nouvelle collection « Coucou caché » est surtout très addictif. Arrivé à la maison il y a peu, il est devenu le livre préféré de bébé Charlotte aux cotés des petits imagiers sonores de Gallimard, c’est dire !


Oseras-tu chatouiller le loup ? d’Emiri Hayashi. Tourbillon, 2014. 20 pages. 10,50 euros. A partir de 12 mois.

L'avis de Mya Rosa











samedi 15 mars 2014

Les gouffres - Antoine Choplin

Quatre nouvelles dans ce recueil. Dans la première, deux hommes marchent vers l’océan. Autour d’eux, le silence et la désolation. Devant eux, la terre s’est ouverte par endroits. Des gouffres vertigineux qui leur tendent les bras et qu’ils vont tenter de contourner. La seconde met en scène Wagram, employé de « La fabrique » dont le job consiste à éviter que le cours des choses ne s’arrête. La 3ème se passe dans un camp. Trois prisonniers mal en point veulent rendre un dernier hommage à une mathématicienne de génie. Dans la dernière, on suit un homme poussant un orgue de barbarie dans les rues d’une ville déserte. Arrivé sur la place centrale, il va tourner la manivelle et commencer à jouer. Pour qui ? Pour quoi ?

Étrange recueil, traversé par une certaine forme d’angoisse. L’univers décrit est déshumanisé, irréel. Partout la solitude. Des personnages qui errent, sans véritable but. Pour moi, c’est l’absurdité du monde qu’Antoine Choplin veut souligner. Des hommes fragiles, vulnérables, dépassés, perdus. Mais aussi des hommes solidaires, unis dans les pires moments par un fil aussi invisible qu’indestructible. Une fraternité, certes peu démonstrative, mais qui tient en de petits riens. Une main sur un bras ou sur une épaule, un geste discret et réconfortant.

Pour autant, je ne ressors pas emballé de ce recueil. Il y a comme un goût de trop peu. Dans la nouvelle éponyme, j’aurais bien accompagné plus longtemps les deux personnages, dignes de Beckett. Pareil pour le dernier texte, j’aurais aimé rester davantage avec le joueur d’orgue. Et puis je n’ai pas retrouvé la magnifique écriture de Choplin, sa petite musique susurrée comme dans un souffle dans « La nuit tombée » et « Le radeau ». A tel point que je me demande si ces nouvelles ne sont pas des œuvres de jeunesse tant elles me semblent « inabouties ». Bref, même si j’ai passé un agréable moment, ce n’est pas un coup de cœur, loin de là.

Les gouffres d’Antoine Choplin. La fosse aux ours, 2014. 132 pages. 16 euros.


Une lecture commune que je partage avec Leiloona et Noukette.






jeudi 13 mars 2014

Des entrées pour le salon du livre à gagner



Comme beaucoup de copinautes, j'ai la chance de pouvoir vous offrir 5 entrées pour le salon du livre qui ouvre ses portes la semaine prochaine. Vous avez jusqu'à demain minuit pour vous manifester dans les commentaires de ce billet. Je ferai le tirage au sort samedi matin.

Personnellement, je serai sur la salon le samedi toute la journée. Je n'ai pas de programme précis en dehors de déambuler dans les allées à la recherche de belles surprises livresques. J'irai aussi rendre visite à mes éditeurs chouchous et je me plierai sans doute à l'exercice de la dédicace avec quelques auteurs de BD.

Peut-être aurais-je le plaisir de croiser certain(e)s d'entre vous comme ce fut le cas l'an dernier. Qui sait ?


mercredi 12 mars 2014

Le Horla - Guillaume Sorel et Maupassant

Dans Le Horla, Maupassant raconte, sous forme de journal, les hallucinations d’un homme persuadé qu’une présence maléfique veut prendre possession de son corps et de son esprit. Un être surnaturel imposant à sa victime sa propre volonté et absorbant peu à peu son énergie vitale. Une nouvelle vraiment flippante dont je garde un souvenir très précis des années après l’avoir lue.

Guillaume Sorel n’a pas choisi de faire une adaptation à l’identique. D’ailleurs il déclarait récemment qu’ « une bonne adaptation est une trahison ». Si certains monologues sont bien des passages du texte source, exit  le journal. Le narrateur est accompagné d’un chat (inexistant à l’origine) auquel il confie ses tourments et ses états d’âme. Il y a aussi une vraie ambiguïté quant au mal qui frappe la victime. Chez Maupassant, il ne fait aucun doute que l’homme souffre d’un trouble du système nerveux et bascule dans la folie. Dans la BD, le problème ne vient pas forcément de sa santé mentale mais il pourrait bien avoir des causes réellement surnaturelles. En tout cas rien n’est clairement tranché je trouve. Ce qui est certain c’est qu’il vit dans une grande solitude, dans un isolement qui va peu à peu accentuer le sentiment de terreur l’envahissant chaque jour davantage.       

Le dessin, c’est pas un scoop, est une tuerie totale. Je dis que ce n’est pas scoop parce que Sorel est un des plus talentueux dessinateurs actuels. Il y a dans cet album des planches incroyables, de véritables tableaux. Et le plus fort c’est que l’esthétisme reste constamment au service du récit, jamais il ne tombe dans la démonstration gratuite. Couleurs, décors, ambiance oppressante à la lueur des bougies, tout est parfaitement travaillé.

J’ai beaucoup aimé la façon dont Sorel s’est approprié le texte d’origine pour mieux le triturer avec ses propres références, finalement beaucoup plus fantastiques que psychanalytiques. Une adaptation à la fois fidèle et personnelle, visuellement somptueuse.



Le Horla de Guillaume Sorel. Rue de Sèvres, 2014. 64 pages. 15,00 euros.

Une lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Leiloona, Noukette et Stephie. Quel trio !

L'avis de Paikanne






mardi 11 mars 2014

Depuis qu’on a déménagé - Ingrid Thobois

« Depuis qu’on a déménagé, on dirait qu’on a plus le droit d’être heureux. »

Depuis qu’elle a déménagé, la narratrice, âgée de 10 ans, n’a plus le droit de regarder la télé, à part le journal de 20 heures. Depuis qu’elle a déménagé, ses parents ne se parlent plus. La joyeuse tablée du soir s’est transformée en « morceau de banquise à la dérive ». Il faut dire qu’avant ils étaient quatre. Maintenant, ils ne sont plus que trois. Sandra, la sœur cadette, n’est plus là. Elle avait quatre ans quand c’est arrivé. C’était l’année dernière.

Le deuil, la douleur, l’incompréhension. Une fillette qui s’interroge et voudrait voir sa mère s’occuper d’elle. « Que maman se souvienne que sur ses deux p’tites, il lui en reste quand même encore une et que […] c’est mieux que rien. » Elle voudrait qu’elle arrête de culpabiliser, qu’elle arrête de prendre ces pilules qui l’abrutissent et qu’elle continue à vivre, tout simplement. Surtout, elle voudrait qu’elle arrête d’avoir l’impression de trahir sa fille morte en s'occupant de sa fille vivante.  

39 pages, un quart d’heure de lecture. Ingrid Thobois propose un texte fort, d’une infinie tristesse. Elle parle du deuil avec justesse. La voix de la narratrice résonne sans fausse note et vous secoue. La scène finale, pleine d’optimiste, ouvre la voix à une reconstruction possible. Un tout petit roman d’une grande puissance qui va, je pense, me poursuivre longtemps.


Depuis qu’on a déménagé d’Ingrid Thobois. Oskar, 2013. 39 pages. 5,00 euros. A partir de 9 ans.

Une lecture commune que je partage avec Noukette. Vous allez me dire "encore" et je vous répondrais que ce n'est pas fini puisque l'on va se retrouver deux autres fois d'ici la fin de la semaine. Comment ça on est devenus inséparables ?

lundi 10 mars 2014

Nouveaux contes de la folie ordinaire - Charles Bukowski

Prenez un gamin de 17-18 ans. Un gamin un peu paumé qui se destinait à une carrière de footballeur, fauché en plein vol par une sale blessure. Un gamin obtenant le bac par le plus grand des hasards alors que ce n’était pas prévu au programme. Un gamin obligé de faire les trois huit dans une usine de crèmes glacées pour aider un peu ses parents. Maintenant imaginez que l’on encourage ce gamin à poursuivre ses études. Dans sa petite ville de province, le choix est limité, très limité. Un DEUG de langues étrangères appliquées ou un autre de lettres modernes, point barre. Comme les langues ce n’est pas son truc, le gamin se tourne vers les lettres, sans conviction. A la fac, il va faire une rencontre. Enfin deux rencontres. D’abord, un étudiant qui va vite devenir un copain. Puis un écrivain. Parce que le copain lui aura mis dans les mains un bouquin de cet écrivain, un bouquin qui a pour titre « Nouveaux contes de la folie ordinaire »…

Voila comment une vie de lecteur se joue. Une vie tout court, même. Parce que sans ce copain et sans ce livre je ne serais pas là pour vous en parler aujourd’hui. J’aurais forcément pris une autre direction. Si certains sont touchés par la grâce, moi j’ai été touché par Bukowski. Foudroyé même. Il est celui qui a ouvert la porte de ma bibliothèque à tous les autres. Pourquoi un tel coup de foudre ?

C’est difficile à dire. Avant toute chose, c’est son écriture qui m’a parlé. Découvrir que l’on pouvait écrire comme ça, qu’on avait le droit, ça a été une surprise totale. Sa liberté de ton m’a stupéfié, choqué, paralysé, enchanté. Évidemment la langue n’est pas belle. Zéro esthétisme. Mais c’est clair, limpide, fluide. Son éditeur lui avoua un jour : « A cause de toi je ne peux plus lire les autres poètes. Tu marches droit au but, sans la moindre fioriture, comme si tu suivais une voie ferrée traversant l’enfer. » Et j’ai découvert pour la première fois quelqu’un s’adressant aux laissés pour compte, aux sans grades, aux marginaux : « j’ai toujours parlé la langue du peuple en l’appliquant au monde de derrière les miroirs. » Le tout sans jugement, sans un regard extérieur mais au contraire en appartenant au monde qu’il décrit. Loin de Zola et du naturalisme, quoi. Si Bukowski vous raconte une bagarre de poivrots, il fait partie des protagonistes. Quand il vous décrit une journée aux courses, il l’a vécue. Les gueules de bois, il a connu ça au quotidien. Bien sûr c’est un gros mythomane et un misogyne de première. Bien sûr, il adorait choquer, il était d'une grossièreté sans limite. Quand il se met dans la peau d’un violeur suivant une beauté jusque dans son appartement, il affabule totalement. Quand il décrit un pédophile surveillant sa proie, il vous donne la nausée.

Bukowski fanfaronne, il est ridicule, il est grotesque, il est tragi-comique. Mais je le trouve génial parce qu’il assume tout cela. Il est dans l’autodérision permanente, sans jamais se prendre au sérieux. Loin de toute prétention littéraire alors qu’il avait des lettres : Genet, Kafka, Céline, Dostoïevski et Fante, entre autres, étaient ses héros.  Mais il est toujours resté dans l’authenticité lorsqu’il écrivait, la peur, la violence, la solitude et les ravages de l’alcool. Il a multiplié les boulots minables pour survivre, devant arracher des heures d’écriture au cœur de journées dont il sortait abruti par la fatigue et les excès en tout genre. J’ai retrouvé des années plus tard l’esprit de Bukowski dans un poème d’André Laude et je crois que c’est tout à fait ce que j’attends de la littérature :

« La langue doit coller à la vérité des hommes
Elle doit se faire humble, salir ses mains
A l’huile des moteurs
Se vêtir de gros draps
Traîner dans les taudis et les hôpitaux
Visiter les solitaires les malades les angoissés les humiliés et offensés
Boire avec les ouvriers des trains du petit jour
Calmement je vous répète que je me fous
De savoir si les esthètes, les branleurs du verbe
Auront ou n’auront pas la nausée
En lisant ces paroles absolument sincères qui ne cherchent pas l’absolu »

La langue de Bukowski, c’est tout cela à la fois. Il restera à jamais, dans mon panthéon personnel, comme le plus grand des écrivains. Et j’ai bien conscience que peu de monde partage mon avis. Mais je vous avoue que j’en ai strictement rien à cirer…

Les nouveaux contes de la folie ordinaire de Charles Bukowski. Le livre de poche, 1991. 315 pages. 6,10 euros.

Ce billet est spécial à bien des égards. J'avais toujours dit que je ne parlerai jamais de Bukowski sur le blog. D'une part, je craignais de ne pas être à la hauteur et d'autre part, notre relation me semblait trop intime pour que j'ose un jour la dévoiler. Mais A Girl from earth et Noukette sont passées par là et m'ont convaincu de me lancer dans une lecture commune. Qu'elles en soient remerciées, je me suis replongé avec un réel plaisir dans les nouvelles de mon cher Vieux Dégueulasse et j'ai hâte de découvrir leurs avis respectifs, même si je me doute bien qu'ils ne seront pas aussi enthousiastes que le mien.



samedi 8 mars 2014

Ma liseuse et moi...

En décembre dernier j'ai eu la chance de gagner une liseuse Kobo grâce aux "Matchs de la rentrée littéraire de Priceminister". Un beau cadeau de Noël. Pas que je souhaitais particulièrement en acquérir une mais j'étais curieux de voir ce que pouvait donner la lecture sur un tel support. Trois mois après, force est de constater que la greffe vers le livre numérique n'a pas prise en ce qui me concerne.

Si je devais lister les inconvénients, je mettrais en premier l’aspect périssable de l’objet (qui existe aussi avec le livre papier évidemment, mais en général on abîme qu’un livre à la fois alors que si la liseuse vous lâche...), son obsolescence programmée aussi. Et puis sa fragilité (je n’emmènerai jamais ma liseuse à la plage, entre le sable et la chaleur...). Sans compter les difficultés de téléchargement que j’ai déjà vécues et qui m’ont juste donné envie de jeter la liseuse contre un mur. Il y a aussi un problème de tarif. Le prix du numérique reste trop proche de la version papier. A 2 ou 3 euros près, je ne vois pas l’intérêt de payer pour du virtuel. L'absence de couleur rend par ailleurs impossible la lecture de BD. Et puis en littérature jeunesse, tous ces albums incroyables au formats atypiques ne peuvent pas être transférés sur une liseuse, ils perdraient leur raison d'être. Mais le plus important pour moi est l’absence totale de plaisir dans la manipulation de la liseuse. En fait, pour de la lecture « fonctionnelle » (presse, recettes, blogs, etc) le numérique ne me pose aucun problème. Mais pour la lecture « fictionnelle » j’ai besoin de contact, de toucher le papier, de caresser la couverture (le dernier exemple en date me concernant est « Mailman » parce que chez Toussaint Louverture, les romans sont de véritables objets-livres qui participent grandement au plaisir de la lecture). Finalement c’est ça mon problème, je vois la liseuse comme un objet utilitaire alors que dans mon esprit le livre est tout sauf utilitaire. Je crois que je suis juste un vieux réac.

Après il y aussi des avantages. Tous ces classiques que l’on peut télécharger gratuitement, l’éclairage d’excellente qualité qui permet de lire en pleine nuit sans réveiller la personne qui est à coté de vous (c’est l’avantage majeur pour moi, surtout que bébé dort encore dans notre chambre et que je ne pouvais plus lire dans mon lit depuis presque un an. Grâce à la liseuse, j’ai à nouveau pu goûter à ce plaisir). Mais clairement, si je ne l’avais pas gagnée, jamais je ne m'en serais acheté une. D’ailleurs je ne l’ai pas allumée une seule fois depuis au moins deux mois, c’est dire.

Conclusion, ma liseuse et moi, on n'est pas fait pour s'entendre. Elle est trop jeune, trop moderne, trop dans l'air du temps, elle n'est pas assez chaleureuse, elle manque de douceur. Et puis elle manque aussi d'expérience, elle a encore tant de choses à améliorer. Bref, elle ne m'a pas séduit, loin de là. Il faut dire aussi que je ne suis pas un homme facile...

Une réflexion autour de la liseuse que j'ai le plaisir de partager avec George, Noukette, Saxaoul et Valérie.





 

vendredi 7 mars 2014

Mailman - J. Robert Lennon

Albert Lippincott, dit Mailman, est facteur à Nestor, petite bourgade de l’état de New York. Mais Mailman n’est pas un facteur comme les autres. C’est un facteur qui aime lire le courrier avant de le distribuer. Il photocopie les missives après les avoir ouvertes à la vapeur. Une sale manie qui va bien sûr entraîner sa perte. Il faut dire que Mailman est un excentrique doublé d’un maniaque. Il a séjourné quelques temps à l’hôpital psychiatrique, où il a rencontré une infirmière qui est devenue sa femme avant de divorcer et de refaire sa vie avec un médecin. Il entretient une relation particulièrement ambiguë avec sa grande sœur, il déteste les chats, qui le lui rendent bien, il s’est lancé un temps dans l’humanitaire au Kazakhstan (le fiasco total) et il sent depuis peu une grosseur sous son bras qui l’inquiète au plus haut point. Bref, Mailman est un drôle de loustic un peu paumé, un homme qui semble ne rien comprendre au monde et aux gens.

« Il se dit qu’il n’a ni passé ni avenir, qu’il n’y a plus de kilomètres parcourus ni de kilomètres à parcourir, qu’il n’attend plus rien, qu’il n’a plus honte de rien. » Et pourtant, il aurait de quoi avoir honte, Mailman, parce que des casseroles, il s’en trimballe un sacré paquet : la fois où sa mère lui a définitivement fait passer le goût de la masturbation, la fois où il s’est fait choper devant un site porno sur un ordi de la bibliothèque municipale, la fois où il s’est retrouvé devant une classe au Kazakhstan, et tant d’autres encore… Ce personnage pourrait être tout droit sorti d’un roman de John Kennedy Toole, même si je l’ai trouvé moins charismatique que le Ignatius Reilly de La conjuration des imbéciles. Il possède néanmoins ce coté misanthrope, ce coté gaffeur maladroit, cette dimension tragi-comique, cette image de loser permanent qui caractérise le héros de Toole. Son combat est perdu d’avance. D’ailleurs, contre qui, contre quoi se bat-il ? Uniquement contre lui-même sans doute, c’est pour cela qu’il n’a aucune chance de gagner.

Un roman drôle, très drôle même, mais pas que. Un roman tragique et au final terriblement pessimiste, mais pas que. Un roman où l’Amérique semble habitée par une population au mieux névrosée, au pire totalement cintrée. Bref, j’ai adoré. A part la fin qui, je dois l’avouer, ne m’a pas plu du tout. Et puis ce pavé aurait mérité quelques coupes franches (je parie que cela ne vous étonne pas venant de moi), certaines anecdotes n’ayant pas grand intérêt. Mais bon, ça reste la littérature US décomplexée que j’aime tant.

Encore une bonne pioche pour les éditions « Monsieur Toussaint Louverture », dont le catalogue regorge déjà de nombre de pépites. En plus, ce qui ne gâche rien, l’objet livre est vraiment magnifique. Un régal de manipuler un ouvrage façonné avec autant de soin. 


Mailman de J. Robert Lennon. Monsieur Toussaint Louverture, 2014. 668 pages. 23 euros.

Une lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Keisha.


jeudi 6 mars 2014

Après l’orage - Selva Almada

D’un coté, le révérend Pearson, pasteur évangélique, et sa fille Leni, 16 ans. De l’autre, El Gringo Brauer, mécano de son état, et son fils adoptif Tapioca. Les premiers sont tombés en panne au milieu de nulle part, sous un cagnard étouffant. Les seconds occupent le seul garage à des kilomètres à la ronde. Une rencontre intense, quatre personnages aux antipodes, une ambiance qui peu à peu va se charger en électricité. Dans ce coin paumé du nord de l’Argentine frappé par une infernale sécheresse, l’orage va gronder, les éléments se déchaîner et les natures de chacun se révéler dans un final que l’on devine rapidement inévitable...

La quatrième de couverture parle d’un huis clos à ciel ouvert et c’est exactement ça. Le face à face entre le révérend et le garagiste est d’une grande force. Le premier est un orateur hors pair, un homme qui sait se montrer convaincant. Le second est un taiseux, profondément athée : « Les affaires du ciel ne l’intéressaient pas. La religion était faite pour les femmes et les hommes faibles. Le bien et le mal, c’était une autre histoire : ça, c’était une question quotidienne, concrète, que l’on pouvait affronter avec son corps. La religion, d’après lui, était une façon d’éluder ses responsabilités. S’abriter derrière Dieu, attendre d’être sauvé, ou rendre le diable responsable du mal qu’on était capable de faire. » Entre eux, l'affrontement ne pouvait que couler de source.

Un excellent premier roman. Chapitres courts, écriture sèche et très visuelle, aller-retour entre le présent du récit et le passé des personnages, Selva Almada possède à l’évidence un vrai sens de la narration. Il y a quelque chose d’hypnotique dans ce texte. Chacun à l’air sûr de soi, maître de ses paroles et de ses actes. Et pourtant on sent que l’étincelle qui va mettre le feu au poudre ne demande qu’à jaillir. Tout tient dans l’ambiguïté des attitudes, dans cette atmosphère immobile et irrespirable qui finit par électriser le décor et les protagonistes. Le début de ma réconciliation avec la littérature argentine à 15 jours du salon du livre, c’est parfait !

Après l’orage de Selva Almada. Métailié, 2014. 134 pages. 16 euros.


Une lecture commune que j’ai le plaisir de partager avec Valérie et une participation de plus à son challenge.





mercredi 5 mars 2014

Perico T1 - Philippe Berthet et Régis Hautière

Cuba, 1958. Le président Batista a du mal à contenir la révolution castriste et les barons de la pègre locale s’inquiètent. Le meurtre d’un américain va mettre le feu aux poudres. Une mallette de billets qui disparaît et le jeune Joaquin, serveur sans histoire dans un casino de La Havane, va voir sa vie basculer. Impliqué malgré lui dans une affaire qui le dépasse, il part pour la Floride avec Elena, jeune chanteuse au charme vénéneux promise à Trafficante, le plus grand parrain de l’île. A leurs trousses, une horde de tueurs sans pitié...

Voila un pitch somme toute classique. Du noir bien serré à la trame simplissime mais d’une redoutable efficacité. Berthet a demandé à Régis Hautière de lui écrire une histoire après avoir lu et adoré Abélard (on peut le comprendre). Le scénariste lui a concocté un récit aux petits oignons dans une ambiance qui n’est pas sans rappeler le « Privé d’Hollywood », l’une de ses plus célèbres séries. En prime, j’ai retrouvé dans ce premier tome plusieurs éléments inspirés d’Abélard : le jeune naïf fou amoureux d’une femme fatale ne s’intéressant pas à lui, l’exil volontaire vers un avenir que l'on pense meilleur, la rencontre impromptue avec un inconnu croisé au cours du voyage... tout ça dans un diptyque. Pour le coup, on peut craindre le pire pour notre jeune naïf quand on connait la fin d'Abélard !

Le graphisme est somptueux et Berthet s’en donne à cœur joie. Cuba et la Floride des années 50-60 sont restitués avec une déconcertante facilité. Voiture, vêtements, architecture, tout y est. Sans compter les femmes à la plastique de rêve, une des « spécialités » du dessinateur des incontournables « Pin-up ».

Un excellent premier volume, qui se dévore d’une traite. Moi qui ne suis pas amateur de polar, je me suis régalé. Et connaissant Hautière, je ne doute pas une seconde que la conclusion de ce road trip trépidant soit à la hauteur.


Perico T1 de Philippe Berthet et Régis Hautière. Dargaud, 2014. 64 pages. 15,00 euros.






dimanche 2 mars 2014

Des hommes en devenir - Bruce Machart

Regardez ces hommes. Celui-là vient de se faire larguer. Celui-ci est « le dernier à être resté en Arkansas » après la mort accidentel de son fils. Cet autre repense, 15 ans après, au jour où il est devenu veuf sur le parking d’un supermarché. Et lui. Son bébé est mort in utero, à sept mois de grossesse. Il se revoit tenant le petit corps sans vie pendant que sa femme hurlait ; « Alors, vous n’allez même pas faire sa toilette. Nettoyez-là, bon Dieu ! Qu’est-ce que vous attendez pour faire sa toilette ! »

Des hommes du Texas. Des « hommes rugueux et robustes, des hommes qui ont les mains calleuses comme du cuir, des hommes qui n’ont pas peur de garder un peu de tendresse dans leur poitrine et de l’exposer au grand jour quand la situation l’exige, quelle que soit la souffrance que cela implique ». Des hommes devant un vide vertigineux. Des hommes pour lesquels le terme « reconstruction » n’est pas un vain mot. « Des histoires d’hommes qui ont tous trois roues sur la route et une dans le fossé. »

Attention, grosse claque, énorme claque. Très longtemps que je n’avais pas lu un recueil de nouvelles d’une telle qualité. Bruce Machart m’avait déjà scié avec Le sillage de l’oubli. Ces nouvelles sont antérieures au roman mais elles montrent déjà que l’on a affaire à un grand écrivain. La puissance de son écriture est incroyable, tout comme sa science de la narration. Les écrivaillons voulant se lancer dans la nouvelle devraient lire ces textes. C’est une leçon magistrale. La quintessence du genre. Un vrai gros et beau coup de cœur (y avait longtemps !).

Des hommes en devenir de Bruce Machart. Gallmeister, 2014. 190 pages. 22 euros

« Quand la femme à laquelle vous êtes fiancé depuis cinq mois rentre à la maison après avoir bossé toute la journée […] quand elle est un peu nerveuse ; quand elle passe la porte et qu’elle vous trouve toujours en caleçon, en train de gribouiller votre dernière histoire sur un bloc-notes, alors que le journal est resté devant la porte d’entrée dans son emballage en plastique même pas ouvert, les petites annonces bien au chaud à l’intérieur, sans que la moindre offre d’emploi ait été encerclée ; et quand elle s’amène dans le couloir quelques instants plus tard, à moitié à poil et en fronçant les sourcils, le visage rouge, aussi impatiente de prendre sa douche que le serait une fermière après avoir saigné un porc, alors vous comprenez que pour elle, vous n’êtes plus que de l’histoire ancienne.»



Et avec un tout petit peu de retard, ce billet signe ma seconde participation au mois de la nouvelle de Flo.